Tous les éditoriaux
CROISSANCE NULLE
News du 01/09/2012
Fin juillet, le gouvernement révisait les prévisions de croissance à la baisse, +1,2 % contre +1,7 % pour 2013. Malheureusement, cela reste utopique. Les économistes tablent sur une croissance quasi-nulle, +0,5 %, à peine mieux que les +0,3 % attendus pour 2012. Pourquoi accorder une telle importance à un chiffre hypothétique décidée dans les cabinets ministériels, l’avenir et l’INSEE se chargeant de le confirmer ou de l’infirmer ? Trop réaliste, il freinera l’ardeur des investisseurs et de ce fait la croissance. Trop optimiste, la France perd de sa crédibilité auprès de ces mêmes investisseurs. En réalité, si ce chiffre est utile pour donner un aperçu de ce que seront les conditions économiques de l’année prochaine et de proposer un cadre aux investisseurs, sa raison d’être principale aujourd’hui est ailleurs. Ce chiffre sert de base à l’établissement du budget 2013 qui sera présenté lors de la loi de finances en automne. Le gouvernement doit ainsi trancher entre volontarisme et fuite en avant. Plus la croissance hypothétique est haute, plus les recettes de l’Etat augmentent mécaniquement, rendant facile le respect du Pacte budgétaire européen qui limite les déficits publics. Mais attention au retour de manivelle et à la confrontation avec la réalité. Il faudra alors trouver les milliards dépensés qui n’auront pas été collectés. Chaque 0,1 % de décalage avec l’hypothèse de croissance représente plus d’un milliard d’euros. Il est fort à parier que le gouvernement choisira un moyen terme entre les 0.5 % des économistes et les 1,2 % anciennement prévus, ce qui se traduira dans le budget par un « trou » de quelques milliards qu’il faudra financer.
Contrairement à ses promesses électorales, il est probable que François Hollande maintienne le gel du barème de l'impôt sur le revenu instauré par le gouvernement précédent. En effet, sans augmenter directement les impôts, cette mesure permet de faire peser sur le contribuable les effets de l’inflation qui devrait être de l’ordre de 2,1 % l’année prochaine. Les tranches d’imposition n’étant pas réévaluées, toute hausse de salaire ou de revenu liée à l’inflation sera imposée plus fortement. Cette mesure toucherait donc tous les assujettis à l’impôt sur le revenu, rendant même imposables une partie de ceux qui en étaient jusqu’alors exonérés.
Face à la conjoncture économique, les Français sont pessimistes, la consommation reste en berne et les chiffres de l’épargne ne sont pas plus rassurants. Selon l'Association française de l'assurance, l'assurance-vie, un placement à long terme, enregistre depuis le début de l’année une collecte nette négative de 4,2 milliards d'euros. Sur la même période, le Livret A et le livret de développement durable affichent une collecte nette de 15,2 milliards d'euros malgré un rendement à peine supérieure à l’inflation, 2,25 %. Ce phénomène devrait s’accentuer avec un relèvement annoncé du plafond du Livret A de 25 % à la mi-septembre, puis encore de 25 % d'ici à la fin de l'année. Les Français, prévoyants, préfèrent des produits d'épargne liquides et disponibles en cas de coup dur. Ils n’ont pas ou plus confiance en l’avenir. C’est cela le plus inquiétant.
Philippe Fort